Le TOP chez l’enfant : quand l’opposition devient un mode relationnel
Il est normal qu’un enfant s’oppose.
Dire « non », tester les limites, défier l’autorité parentale ou scolaire fait partie intégrante du développement. Mais parfois, l’opposition n’est plus un simple passage : elle devient la toile de fond du quotidien, une manière d’être au monde et de se relier aux autres. C’est ce que l’on appelle le trouble oppositionnel avec provocation, ou TOP.
Qu’est-ce que le TOP ?
Le trouble oppositionnel avec provocation (DSM-5) se caractérise par un ensemble de comportements récurrents, présents depuis au moins six mois, et inadaptés à l’âge de l’enfant. On y retrouve :
- des colères fréquentes et disproportionnées,
- une tendance à contester systématiquement les règles,
- une hostilité envers les figures d’autorité,
- une propension à provoquer volontairement,
- une hypersensibilité aux remarques, accompagnée d’un ressentiment tenace.
On ne parle pas ici de simples crises liées à la frustration ou à la recherche d’autonomie. Le TOP implique une fréquence élevée et une rigidité des comportements, au point d’entraver la vie familiale, scolaire et sociale.
Quand l’opposition devient relation
Chez l’enfant avec TOP, l’opposition n’est pas seulement une réaction. Elle devient un mode relationnel. C’est par le conflit qu’il s’exprime, qu’il teste l’autre, qu’il cherche à exister. Là où un autre enfant réclamera de l’attention en montrant ses réussites, lui l’obtient par la confrontation.
Ce « non » permanent n’est pas toujours un refus en soi. Il peut traduire une difficulté à réguler ses émotions, un besoin de contrôler un environnement perçu comme imprévisible, ou encore une quête de reconnaissance. En somme, l’opposition est utilisée comme un outil de lien — paradoxalement douloureux pour lui, et épuisant pour son entourage.
Le vécu autour de l’enfant : familles et professionnels
Les familles se disent souvent « à bout de souffle ». Elles oscillent entre colère, culpabilité et découragement. Le quotidien peut se transformer en un champ de bataille permanent, où chaque consigne tourne à l’affrontement.
À l’école, l’enfant est rapidement étiqueté comme « insolent » ou « ingérable », ce qui accentue le sentiment de rejet. Les enseignants, faute d’outils spécifiques, renforcent parfois malgré eux le cercle vicieux : plus l’enfant s’oppose, plus il est sanctionné, plus il s’oppose encore.
Pour les professionnels, le TOP constitue un défi. Il oblige à penser autrement la relation, à sortir du rapport de force pour construire un espace sécurisant. Cela demande de la constance, de la patience et une vigilance permanente pour ne pas tomber dans le piège de l’escalade.
Comment intervenir ?
Il n’existe pas de recette miracle. Mais plusieurs approches ont montré leur efficacité lorsqu’elles sont combinées :
1. La psychoéducation
Informer et soutenir les parents. Comprendre que le TOP est un trouble reconnu, et non un simple « caprice », aide à réduire la culpabilité et à ajuster les attentes.
2. La guidance parentale
Donner aux parents des outils concrets pour poser un cadre clair et cohérent. Apprendre à choisir ses batailles, à maintenir des règles simples, à valoriser les comportements adaptés plutôt qu’à se focaliser sur les transgressions.
3. Les thérapies cognitives et comportementales (TCC)
Travailler avec l’enfant sur la gestion des émotions, l’impulsivité et la résolution de problème. Introduire des techniques de relaxation, d’auto-observation et de communication non violente.
4. Le renforcement positif
Valoriser systématiquement ce qui va bien, même de petites réussites. L’enfant avec TOP entend souvent ce qu’il fait mal : l’aider à percevoir ses progrès nourrit son estime de soi et réduit le besoin de s’opposer pour exister.
5. L’approche systémique
Regarder l’enfant dans son ensemble : famille, école, fratrie. Les symptômes du TOP ne sont pas isolés, ils s’inscrivent dans une dynamique relationnelle. Travailler avec tous les acteurs permet de casser les cercles vicieux.
Un défi mais pas une impasse
Accompagner un enfant avec un TOP demande une posture stable : ni dureté excessive, ni permissivité totale. C’est offrir un cadre qui tienne, même face à l’opposition la plus féroce. Cela implique de rappeler à l’enfant qu’il a le droit d’exister autrement que dans la confrontation.
Le TOP n’est pas une identité. C’est un mode relationnel qui s’est figé, mais qui peut évoluer avec un accompagnement adapté. Derrière le « non » se cache souvent une quête de sécurité, de reconnaissance et de lien. Le travail thérapeutique, associé au soutien familial et scolaire, permet peu à peu de transformer l’opposition en un autre langage, plus constructif, plus apaisé.
