Billet d'humeur : Quand l’enfant consulte… mais que le parent est (aussi) concerné
Il y a cette idée, tenace, que la thérapie pour enfant, c’est comme un rendez-vous chez l’orthodontiste : on dépose l’enfant avec son "problème", on attend dans la salle, et on revient le chercher une heure plus tard, tout neuf, remis en ordre. Comme si le psy avait une boîte à outils spéciale pour recoller les morceaux et renvoyer l’enfant "réparé".
Sauf qu’un enfant, ce n’est pas une dent tordue ni une roue de vélo voilée.
Un enfant, ça vit dans un système. Dans une famille. Ça respire les émotions qui circulent à la maison, ça absorbe les non-dits, ça rejoue parfois les blessures que les parents n’ont pas vraiment soignées. Bref : il ne pousse pas dans le vide.
Et c’est là qu’on se heurte à une évidence qu’on préfère souvent ignorer : très souvent, le "patient désigné", ce n’est pas vraiment l’enfant. C’est le parent. Ou plutôt, c’est la relation entre eux. L’enfant est un peu comme le haut-parleur qui diffuse, parfois malgré lui, les interférences émotionnelles familiales.
Quand un petit garçon de 7 ans dit qu’il a peur de décevoir, c’est souvent l’histoire d’un parent qui, lui aussi, a grandi avec cette peur chevillée au corps. Quand une fillette de 10 ans explose de colère pour un détail, il n’est pas rare que ce soit le reflet d’une frustration parentale jamais exprimée. Les enfants portent, parfois à leur insu, les névroses qui ne sont pas les leurs. Et la thérapie vient mettre ça en lumière.
Alors oui, il y a des moments où la séance avec les parents bouscule plus que celle avec l’enfant. Parce que dans ce miroir, on se voit soi-même. Et ce n’est pas toujours agréable de se rendre compte que ce que l’on pensait "corriger" chez son enfant est en fait une vieille histoire qu’on traîne soi-même depuis des années.
C’est pour ça que l’implication parentale est essentielle. Pas pour "contrôler" la thérapie, mais pour comprendre ce qui se rejoue, pour prendre du recul et, parfois, pour s’autoriser à déposer son propre fardeau. Parce qu’un enfant qui évolue dans un climat familial plus apaisé, plus conscient, progressera bien plus vite qu’un enfant qu’on "répare" seul, sans changer ce qui l’entoure.
La vérité, c’est qu’on ne soigne jamais un enfant tout seul. On soigne une dynamique. On réajuste des équilibres. On ouvre un espace où chacun peut respirer un peu mieux.
Alors, la prochaine fois qu’on vous dit "c’est votre enfant qui doit aller en thérapie", entendez aussi ce message caché : vous êtes invités, vous aussi, à vous mettre en chemin. Parce qu’un enfant n’est jamais isolé de son parent. Et que vouloir soigner l’un sans impliquer l’autre, c’est un peu comme remplir un seau percé : ça fuit de partout.
Cet article reflète mon commentaire à l’article
« Je ne vais pas voir de psy parce que je n’ai rien à lui dire ».
J’y avais mentionné ado, avoir dû consulter une psy, protéger qqu et finalement ça s’est orienté vers une consultation enfant-parent pour le parent :)
J’étais une enfant colérique mais c’était la colère dans le foyer, le mode de communication dans ce cocon, pcq en public tout allait bien.
J’avais même appris à « paraître » mais avec du recul j’aurai pu désamorcer les conflits du cocon familial bien plus tôt, si j’avais eu la compréhension de ce qui se joue.
Tu as raison, un enfant n’est pas une roue voilée, c’est bien le reflet de peurs des autres (souvent des parents) ou le miroir des émotions et des traumas qui durent trop longtemps pour eux.
Bonne journée et merci pour cet article 🙏
Et quand on entend tjs la phrase " tu es comme ton père", ça signifie aussi un Trauma caché du parent ?
Beaucoup de gens l'ont entendue cette phrase d'ailleurs je pense...
@Jade-DMZ 91132 : je ne suis pas psy. Cependant, je pense que ça dépend du contexte dans lequel cette phrase est sortie.
Imaginons la maman divorcée d'un mari violent qui voit son enfant devenir violent à son tour, là oui on peut dire que c'est un trauma selon moi car la violence marque négativement.
Par contre, si la maman souligne que l'enfant a des réflexions ou des attitudes comme son père, ça peut tout simplement signifier que c'est très flagrant et donc, elle le souligne.