🧠Monter un profil psy : méthode scientifique ou art divinatoire ?
Ah, le bilan psy ! Ce moment solennel où l’on passe du flou artistique au portrait robot. Où l’on espère faire surgir la vérité d’un enfant (ou d’un adulte) à travers des chiffres, des graphiques, des "échelles", des "profils"… et un peu de flair. Beaucoup de flair.
Parce que soyons honnêtes : faire un profil psychologique, ce n’est pas juste additionner des scores, poser un nom bien rangé dans une case DSM et faire un copier-coller du manuel. C’est surtout une danse subtile entre l’écoute, les observations cliniques, les tests, les contradictions, les silences... et parfois même la météo du jour, tant qu’à faire.
🎠Quand le patient fait son show (et que tu dois rester pro)
Chez l’enfant
Entre l’enfant qui récite par cœur toutes les capitales du monde mais ne tient pas en place deux secondes, et l’ado qui te balance "j’sais pas" en te regardant droit dans les yeux pendant 45 minutes, il faut réussir à voir au-delà du vernis. Détecter ce qui relève d’un trouble, ce qui relève de l’histoire familiale, ou ce qui est juste... un mardi difficile.
Et pendant ce temps, les parents te regardent comme si tu allais leur révéler la carte au trésor de l’âme de leur enfant.
Spoiler : on l’a rarement. Par contre, on a des hypothèses. Plein.
Chez l’adulte
Et chez l’adulte… c’est pas mieux. Parce que là , tu as quelqu’un qui a appris à camoufler. Un pro de la compensation. Un champion de l’adaptation sociale. Ça te dit qu’il "a toujours été comme ça", mais qu’il en a marre de lutter, que ça déborde. Et ça veut comprendre.
Tu creuses, tu creuses, tu sens bien qu’il y a un truc... mais tu dois faire le tri entre les conséquences et les causes, les blessures de l’enfance et les schémas d’aujourd’hui. Et surtout : ce qui peut encore bouger. Parce que poser un profil chez l’adulte, c’est aussi reconnaître ce qui s’est figé, ce qui résiste, et ce qui peut se réparer.
📊 Le test qui dit tout (ou pas)
On pose des bilans, on fait passer des questionnaires, on trace des percentiles, on imprime des jolis profils en araignée... Et puis on se rend compte que le gamin a répondu n’importe quoi parce qu’il s’ennuyait. Ou que la mère a coché "toujours" partout pour bien te montrer qu’elle est épuisée. Ou que le père, lui, a répondu "jamais", parce que "c’est juste un manque de discipline tout ça".
Et chez l’adulte ? Même combat. TDAH suspecté → 27 tests remplis. Auto-questionnaires, échelles de symptômes, profils attentionnels... Mais parfois, la personne se reconnaît dans toutes les cases. Le borderline ? Oui. Le HPI ? Bien sûr. L’hypersensible ? Absolument. L’anxieux ? Aussi. C’est simple : à ce stade, on pourrait leur coller un bingo du DSM à remplir.
Tu dois trier, pondérer, remettre du réel, remettre du lien. Parce que poser un profil, c’est pas valider un test Buzzfeed "Quel trouble êtes-vous ?"
🕵️‍♂️ Poser un diagnostic sans se prendre pour Sherlock
Et puis il y a ce moment redouté : poser un mot. Pas pour étiqueter, pas pour enfermer, mais pour ouvrir une compréhension. Et là , il faut marcher sur des œufs en équilibre sur un trampoline.
On dit “hypothèse de fonctionnement”, “traits compatibles avec…”, “éléments repérés suggérant une tendance à …”. On ne dit pas “vous êtes ceci ou cela”. Parce que non, un humain ne se réduit pas à une case. Il évolue, il compense, il décompense, il bifurque.
Chez l’adulte, on est souvent face à des années d’accumulation, de stratégies d’évitement, de burn-out masqués, de systèmes familiaux qui continuent de jouer en coulisses. Parfois, on pose un mot, et c’est un soulagement immense. Parfois, c’est une déflagration. Et parfois… on attend. Parce que le vrai travail commence après le bilan.
🎨 Profilage artisanal depuis 2018
Dans le fond, on ne monte pas un profil. On sculpte une histoire. On la rend lisible. On la rend audible. On en extrait des points d’appui, des zones de tension, des chemins possibles.
Et entre les lignes, on glisse aussi un peu de notre subjectivité, notre expérience, notre humanité. C’est peut-être pas académique, mais c’est ça aussi, le métier.
Alors à tous ceux qui pensent qu’on sort les diagnostics d’un chapeau ou d’un algorithme : venez passer une journée avec nous. Vous verrez, c’est du sport. Mais du sport doux, émotionnel, analytique, un peu comme du yoga pour le cerveau. Avec parfois une petite crampe à la temporalité des familles.
