Une journée dans la peau d’un psy : récit d’un lundi d’été

Un article de Fantomas-2
Publié le 08/09/2025
Dans la section #Psychologie
Article public d'intéret général
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🛋️ Une journée dans la peau d’un psy : récit d’un lundi d’été

Non, je ne passe pas ma journée à faire "hmm hmm" en silence.
Non, je ne suis pas une machine à analyser le moindre mot que tu prononces.
Et non, je ne médite pas entre chaque rendez-vous en lévitant dans un nuage de sauge.

Je suis psy. Psychopraticien pour être exact.
Et aujourd’hui, j’ai eu envie de t’emmener dans ma journée.
Pas une journée extraordinaire. Pas un jour de crise ou de révélation spectaculaire.
Un lundi. Un simple lundi. En plein été.

Je ne prends jamais plus de six patients par jour, sauf exception : quand les suivis sont légers ou que la relation est déjà bien installée. En moyenne, j’en accompagne cinq ou six sur une journée.
C’est mon seuil. Mon équilibre. Ce qui me permet d’être présent, entier, sans m’effilocher.

Parce que parfois, mon métier est intense, bouleversant, stimulant…
Et d’autres fois, il est juste humain, ordinaire, et profondément vivant.

🕛 12h00 – Le cabinet s’éveille

J’arrive. Il fait déjà chaud.
J’ouvre les volets, les fenêtres – même l’hiver je le fais. Le cabinet doit respirer, moi aussi.

Je lance mon ordinateur, je consulte mes messages, je trie les priorités.
Puis je me plonge dans mes outils :

  • bilan à compléter,
  • anamnèses à finaliser,
  • protocoles de soin à amorcer pour les nouveaux patients.
    C’est un moment calme. Avant la tempête, parfois.

🕐 13h45 – Préparer le terrain

Petit rituel de pré-séance :

  • fermer les fenêtres, abaisser les stores,
  • vaporiser un peu de parfum d’ambiance,
  • faire un petit pipi (prévoyant, toujours),
  • et respirer deux minutes dehors.

Et selon l’énergie qu’il me reste… ou celle que je pressens devoir mobiliser :
je grignote une barre protéinée.
Pas très glamour, mais bien pratique. Ce jour-là, c’est la version "prévention" : je sens que la journée va être dense.

🕑 14h00 – Dépression et addiction

Premier patient de la journée. Deuxième rendez-vous.
Il souffre de symptômes dépressifs, avec une addiction à l’alcool.
On continue à poser les bases de l’anamnèse, et déjà, je commence à esquisser un protocole :
Peut-être un TCC ciblé. Peut-être un travail sur la honte.
Je note ça discrètement, dans un coin de mon carnet. Rien n’est figé. Tout est à construire.

🕒 15h00 – Une maman, plusieurs greffes, une fusion

Deuxième rendez-vous aussi.
Une jeune maman, greffée plusieurs fois des reins. Une histoire médicale lourde. Un corps marqué.

Elle vit dans une fusion totale avec son fils.
Il est son ancrage, son repère, sa vie.
On parle d’abandon, de peur panique, d’hypervigilance maternelle.
Un amour fort, mais qui frôle l’étouffement.
On essaie d’aérer la relation, de faire de la place… pour elle.

🕓 14h55 – Micro-pause

Petite pause vite fait entre deux.
Re-barre protéinée, parfois. Version "secours" cette fois.
Je fais le plein avant la dernière ligne droite.
Pas le temps pour autre chose, mais c’est souvent suffisant pour tenir.

🕓 16h00 – Une petite louloute et ses gros nuages

C’est une enfant. Elle sourit à peine.
Elle est suivie pour une dépression infantile, un manque de confiance en elle.
On parle peu. On joue beaucoup.
Le jeu, ici, c’est du langage. Une passerelle.
Je ne cherche pas à l’arracher au silence. Je l’accompagne doucement jusqu’à elle-même.

🕔 17h00 – Colère et thérapie des schémas

Je retrouve un jeune adulte.
Il lutte contre sa colère, qui jaillit sans prévenir.
Pas de violence, non. Mais un feu qui le ronge.

On travaille en thérapie des schémas et en thérapie émotionnelle.
On cherche les blessures anciennes, les nœuds enfouis, les réflexes appris.
Ce n’est pas simple. Mais il avance.

🕕 18h00 – TDAH, TOP et guidance parentale

Dernier rendez-vous du jour : un accompagnement familial.
L’enfant est atteinte de TDA/H et de TOP.
Je reçois les parents, je les guide.
On parle d’outils, d’aménagements, de déculpabilisation, surtout.
Aimer un enfant neuroatypique, c’est tout un apprentissage.
Et parfois, il faut aussi apprendre à s’aimer en tant que parent.

🕖 19h00 – Clôture

J’ajuste mes notes. Je relis les dossiers.
Je stabilote deux ou trois points à revoir. Je ferme doucement.

À 19h20, je quitte le cabinet.
Et je redeviens moi, hors cadre. Parce que ma vie à moi, elle m’attend dehors. Et elle est précieuse aussi.

💬 En guise de conclusion…

Être psy, ce n’est pas juste écouter.
C’est s’ajuster, se rendre disponible, tenir, parfois longtemps.
C’est faire de la place sans s’oublier.
Et c’est aimer les humains dans leur chaos ordinaire.

Chaque journée est différente.
Mais il y a toujours cette constante :
Je suis là. Vraiment là. Pour eux. Pour elles. Pour toi, peut-être.

3 commentaires
Un égaré
()
Merci pour ton témoignage. Ça donne envie de faire une thérapie avec toi :) On ressent beaucoup de respect et d’intérêt dans ta manière d’aborder les patients. D’experience c’est pas toujours le cas.
LeDétective
()
Très beau témoignage, on ressent l’équilibre de vie, et non se sentir bouffé par les consultations à outrance.

J’admire cela

Comment ne pas se sentir bouffé?
Les soignants, on donne beaucoup d’énergie pour les patients, les mettre à l’aise, avoir une capacité d’écoute et d’empathie, et parfois le manque de reconnaissance du système (financièrement compliqué du coup) et du patient même (des appels le dimanche, ou le soir à des heures improbables),…
J’ai l’impression de constamment répéter le cadre.
C’est ca, d’être une perle rare (vestibulaire)
Mais c’est dur, d’autant plus quand on a son propre corps qui marque des signants de lever le pied
Un espion
()
Belle conclusion..c'est poétique presque.

Ça doit être dur de voir des personnes et leurs problèmes toute la journée ... surtout voir des enfants pas bien.

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