L’éco-psychologie : un pont entre crise environnementale et bien-être psychologique

L’éco-psychologie est une discipline émergente qui cherche à tisser des liens entre la psychologie humaine et la nature. En réponse à l’éco-anxiété – cette angoisse liée à la crise climatique –, des thérapeutes spécialisés tentent d’apporter des solutions adaptées. Pourtant, peu de patients osent consulter pour ce motif, tant il reste difficile d’admettre que l’on peut être profondément affecté par l’état de la planète.

Une discipline née d’un constat

Face aux bouleversements climatiques, faut-il se tourner vers une éco-thérapie ? Théodor Roszak, historien et essayiste, a posé les bases de cette réflexion dans son ouvrage Les Voix de la Terre (1992). Il y défend l’idée que la crise écologique ne relève pas seulement d’une problématique environnementale, mais qu’elle est aussi un enjeu psychologique et spirituel. Autrement dit, notre mal-être face aux dégradations de l’environnement serait une conséquence directe de notre déconnexion avec la nature.

Invitée de l’émission Zoom Zoom Zen, Manuela Santa Marina, psychologue clinicienne et praticienne EMDR (technique thérapeutique utilisée dans le traitement des psychotraumatismes), constate une augmentation des cas d’éco-anxiété parmi ses patients. Ce phénomène, encore peu abordé dans le champ médical, reste mal compris.

Avec Charline Schmerber, psychothérapeute à Montpellier, elle a cofondé le Réseau professionnel d’Accompagnement Face à l’Urgence Climatique (RAFUE). Une enquête menée par Schmerber a révélé que de nombreuses personnes ressentant cette anxiété climatique évitent d’en parler, persuadées que leur détresse est illégitime face à un problème collectif.

L’éco-psychologie : une approche interdisciplinaire

L’éco-psychologie est née dans les années 1990 à l’université de Berkeley, en Californie, à la croisée de plusieurs disciplines : psychologie, écologie transpersonnelle et éco-thérapie. Comme le souligne Cyril Lacarrière, rédacteur en chef de l’émission, elle ne se limite pas à une introspection personnelle, mais interroge aussi notre place dans le monde et notre rapport à l’environnement.

Roszak, déjà à l’origine du terme contre-culture, voulait montrer que l’éco-psychologie ne relevait ni d’un phénomène de mode ni d’une pensée marginale, mais bien d’un courant structuré et légitime, impliquant une dimension politique.

Cette approche repose sur une idée simple : nous faisons partie intégrante de la nature, et si notre environnement se dégrade, notre bien-être s’en ressent forcément.

Longtemps perçue comme une préoccupation minoritaire, cette vision était surtout relayée par les mouvements de contre-culture en Occident. Pourtant, dans de nombreuses sociétés traditionnelles, le lien entre nature et santé mentale est une évidence depuis des siècles.

Une prise de conscience en pleine évolution

L’éco-psychologie s’inscrit dans une dynamique de transformation de nos rapports à l’environnement et à nous-mêmes. Avec la montée en puissance des préoccupations climatiques, elle pourrait bien devenir une réponse essentielle à un mal-être collectif grandissant.

Alors que le sujet peine encore à trouver une place dans les consultations classiques, les initiatives comme le RAFUE visent à structurer une prise en charge adaptée.

Si la crise écologique est un défi planétaire, elle est aussi un bouleversement intérieur. L’éco-psychologie offre ainsi un cadre pour comprendre et accompagner ces émotions trop souvent tues, afin d’en faire une force d’action plutôt qu’une source d’angoisse.

Sources

• Roszak, T. (1992). Les Voix de la Terre.
• France Inter, Zoom Zoom Zen (28 janvier 2025).
• RAFUE (Réseau professionnel d’Accompagnement Face à l’Urgence Climatique).